Pour comprendre l'origine du N°6, il faut remonter aux années 50. A l'époque, les principales équipes jouent en WM. Mais les hongrois vont innover en faisant reculer leur avant-centre (Hidegkuti) derrière les 2 pointes du W (en l'occurrence Puskas et Kocsis). Le fameux N°10, qui allait dicter le tempo pendant les 4 décennies suivantes, était né.
En un sens, tout a changé derrière le N°10 mais les meilleures équipes jouaient toujours avec un "trequartistas", entre les milieux et la défense, derrière les 2 attaquants (Platini, Maradona, Zidane, Pelé). Presque tous les plus grands joueurs ont occupé ce poste. Et puis, les équipes se sont adaptées et ont cherché à annihiler le talent des meneurs de jeu. Pour ce faire, elles ont positionné un milieu devant la défense. Celui-ci n'était pas seulement chargé de surveiller sa zone mais aussi d'intercepter les passes par son placement, de tacler et de perturber le jeu du N°10. Prix à payer : son apport offensif est normalement très faible. Il demeure assez bas sur le pré. En outre, sa technique est plutôt frustre. Il est souvent le premier relanceur de son équipe mais il le fait via des passes courtes, souvent latérales qui permettent d'éviter une perte de balle immédiate. Enfin, il fait preuve d'une activité inlassable et possède un goût du duel très affirmé.
Ce rôle de destructeur, dont Makélélé fut l'archétype (et John Obi Mikel son disciple) a peu à peu poussé les joueurs les plus brillants vers les côtés (Ribéry, Ronaldo, Müller, Neymar) ou un cran devant (Messi, Rooney) reléguant les numéros 10 au rang de curiosité sud-américaine (Pastore). Ceci dit, il fallait bien organiser le jeu : ici intervient le meneur reculé. Le parfait exemple en est Pirlo : positionné plus bas, celui-ci n'a pas à craindre un pressing adverse intense. Il peut distribuer le jeu, via des ouvertures longues, il est libre de monter s'il le juge utile. Rançon du succès : c'est un joueur qui est naturellement peu porté sur la défensive et donc moins apte à perturber les attaques adverses. Ses montées peuvent constituer un danger en découvrant son camp. Il doit souvent être protégé de près par un autre milieu défensif pour le couvrir en cas de rush adverse (Gattuso au Milan AC, De Rossi chez les Azzurri).
Mais quid si un "hybride" apparaît ? Un mélange d'agressivité et de créativité ? Celui-ci existe, il s'appelle Marco Verratti et préfigure les nouveaux N°6, capables de verticalité ET teigneux, décisifs MAIS prudents.
Voyons cela en statistiques :
- Le N°6 destructeur. John Obi Mikel possède des statistiques simples : il effectue le plus de passes de son équipe avec un taux de succès très important. Il procède donc en passes courtes (2,2 par match) , prend peu de risques, ne tire quasiment pas, ne marque dons pas et ne réalise aucune passe décisive. Il tacle raisonnablement mais surtout intercepte beaucoup (2,2 par match).
- Le N°6 meneur reculé. Pirlo écrase les autres joueurs de la Juve en nombre de passes par match (81 contre 67 pour le second, le défenseur Chiellini) mais est loin d'être le plus précis. En cause, un plus grand nombre de passes longues (9 par match) et une présence plus importante dans le camp adverse. Il tire plus, marque et fait des passes décisives. Défensivement, Pirlo tacle mais mal et intercepte peu (1 ballon par match).
- Enfin le "Makélolo", Marco Verratti, donc. Celui-ci possède des statistiques, eh bien, intermédiaires. Il n'est pas devant en nombre de passes (signe qu'il n'est pas un passage obligé dès que son équipe récupère la balle) et en taux de succès. Il effectue 5 passes longues et réalise presque 2 interceptions par match tout en réussissant ses tacles. Il ne tire jamais mais grâce à sa précision sur passes longues a déjà réussi 2 passes décisives. Il met ses partenaires du milieu à l'aise offensivement (Matuidi, Chantôme) et rend ainsi redondant un profil de milieu défensif à ses côtés (Thiago Motta).
- Il est parfaitement adapté en milieu reculé dans les dispositifs 4-4-2 losange, 4-3-3 (le dispositif à la mode) ou 3-5-2. Il sécurise ses coéquipiers défensivement mais offre aussi une solution dès que l'équipe récupère le ballon et peut se montrer décisif en contre. En revanche, il est vrai que dans les milieux à 2 (4-2-3-1, 4-4-2 à plat), sa polyvalence peut être un obstacle, sachant qu'un entraîneur préférera 2 joueurs au profil plus marqué : typiquement un couple destructeur / relayeur (Mikel / Lampard).
- La proximité des lignes le rend décisif lorsqu'il parvient à marier récupération puis passe longue dans un même mouvement, ce qu'aucun autre profil ne parvient à réaliser, surtout si ses partenaires parviennent à "gicler" suffisamment vite.
- Enfin, sa polyvalence le rend précieux pour gérer des temps de jeu où la tactique initiale est modifiée (afin de gérer le score par exemple) ou si l'équipe doit faire l'objet d'un réajustement tactique.
Footballistico
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