mardi 13 novembre 2012

Comment le foot évolue : le N°9 passeur décisif

Avant, c'était simple : le rôle du N°9 était simplement de marquer. Bien entendu, l'avant-centre pouvait se décliner de différentes façons :
  • rapide et percutant (à la Torres) permettant à l'équipe de trouver l'attaquant lors de contres,
  • grand et puissant (Drogba) qui servent de point d'appui et de cible lors de centres aériens,
  • devenu plus rare, le renard, toujours à la limite du hors-jeu, un sens du placement inné, un peu truqueur, il permet d'exploiter au mieux les ballons, souvent mal donnés par ses co-équipiers et de transformer des miettes en or.

Il serait bien entendu réducteur de transformer les avant-centres en joueurs passifs attendant simplement les ballons : ils constituent souvent le premier élément du pressing (comme l'a démontré Torres en ligue des champions, la semaine dernière) et un point d'appui pour les relances longues. Néanmoins, offensivement, leur point commun est de participer de façon parcimonieuse à la construction mais de constituer une menace permanente dans la surface adverse.

Cela dit, cette menace perpétuelle rend le jeu trop prévisible (ce qui ne veut pas forcément dire toujours facile à contrer). En retirant un joueur de la construction, on diminue la capacité de l'équipe à proposer des solutions alternatives.

Bien entendu, cette idée de faire reculer un attaquant n'est pas totalement nouvelle, la notion de 9 1/2 et du 4 - 4 - 1 - 1 pré-existait mais souvent en appui d'un "vrai" avant-centre. Avec la généralisation des dispositifs en 4-2-3-1 / 4-3-3, l'unique attaquant de pointe devient ainsi partie intégrante du jeu, alors qu'il était jusqu'à présent un peu en marge, un caractère à part.

Face à ce constat, les équipes joueuses ont donc commencé à réagir :
  • Messi. L'idée sans doute la plus géniale de Pep Guardiola a été de positionner Messi en avant-centre capable de décrocher. Messi posséde la capacité de rentrer balle au pied depui les 30-35 mètres mais surtout de donner des passes décisives à ses partenaires qui plongent derrière la défense (Villa l'a fait 2 fois lors de la fameuse "manita" au Camp Nou).
  • Van Persie. Il était normal qu'Arsenal émule le Barça. Robin Van Persie participait souvent au jeu d'Arsenal en se positionnant en N°10. La difficulté pour Arsenal était de fournir des joueurs offensifs de la trempe de Villa aux cotés du hollandais.
En termes de statistiques, les profils de ces 2 types de joueurs sont très typés :

  • les attaquant classiques (Torres, Gomez, Falcao, Higuain, Giroud, Gignac) effectuent au maximum une vingtaine de passes par match, avec un taux de réussite plutôt faible (moins de 80%), tirent beaucoup (environ 3 tirs par match). Surtout, les passes décisives sont souvent un hasard. Falcao a marqué 10 buts mais effectué une seule passe décisive, Torres 0 (pour 7 buts).
  • les attaquants créateurs (Jovetic, Benzema, Ibrahimovic et donc Van Persie) font plus de passes (souvent 30, jusqu'à 40 pour Zlatan), possèdent un taux de passes réussies plus important (souvent 85% et plus, ce qui témoigne d'un positionnement plus décroché et aussi d'une technique très sure) mais surtout ont un taux de passes décisives très important par rapport au nombre de buts marqués.
Ce dernier point suscite d'ailleurs parfois des incompréhensions : pour le grand public, un attaquant, ça doit marquer. Passe encore s'il marque beaucoup ET qu'il réalise des passes décisives mais dans le cas contraire...

Le seul critère qui vaille est : ce type de système est-il efficace ? En effet, la perte périodique d'un point d'appui peut être troublant pour les latéraux et les autres attaquants censés alimenter leur avant-centre. Vers qui centrer ? Inversement, un 9 décroché offre souvent des problématiques insolubles à la défense adverse :
  • pour la défense centrale : suivre l'attaquant ou le laisser libre et dégarnir ainsi la surface de réparation ?
  • pour le milieu de terrain défensif : prendre le relai de la défense ou s'occuper en priorité des milieux offensifs adverses ?
En fait, l'efficacité de ce type de dispositif dépend de plusieurs paramètres :
  •  un 9 décroché doit compter sur l'un de ses coéquipiers capable de plonger dans l'espace libéré (souvent en diagonale). C'est naturel en 3-5-2 (Jovetic) ou 4-4-1-1 (Rooney) mais lorsque l'attaquant est isolé, il doit pouvoir compter sur l'un de ses partenaires à l'aile pour finir le job (Villa avec Messi et Ronaldo avec Benzema). 
  • le nouvel avant-centre doit pouvoir profiter du décrochage pour frapper de loin. C'est le cas d'un Ibrahimovic. Lorsque Zlatan frappe en dehors de la surface, il ne s'agit pas seulement de situations de contre : il est souvent dans le cas (comme face à Nancy) où il dispose d'une marge de manœuvre car ses défenseurs ne l'ont pas suivi.
  • enfin, l'équipe doit pouvoir disposer d'un plan B. Les décrochages incessants, c'est  bien mais si votre adversaire "parque le bus" derrière et dispose ainsi d'une densité forte de joueurs dans ses 20 mètres, ça ne va pas amener grand chose. A ce moment, le fait d'étirer la défense en écartant le jeu, la présence sur coup de pied arrêté ou une capacité à combiner dans un mouchoir de poche redeviennent la tactique privilégiée. Encore une fois, Zlatan offre un plan B précieux sur coup de pied arrêté.


Conclusion : le pari de Footballistico : quelques managers vont sans doute mobiliser de plus de joueurs atypiques en N°9 : Hazard, Valbuena, Callejon sont des candidats naturels et on peut s'attendre à ce qu'émerge dans les années qui viennent d'autres candidats à ce poste hybride : le "9/10".

Footballistico

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