vendredi 25 mai 2007

Foot français : La guerre des villes de Foire

Le Foot en France possède une particularité intéressante à l’échelon européen. Plutôt que de rassembler des affrontements intra-villes sanglants, il donne en effet lieu à des rivalités picrocholines entre des bourgs en général voisins et sympathiques même s’ils sont peu représentatifs de la puissance enviée de notre football. Ces batailles de village, plus dignes de la guerre des boutons que de la Ligue des Champions sont propres à notre pays de terroir, de football de haut niveau récemment éclos (dans les années 80, en fait) et de l’étendue de notre bel Hexagoal. A l’étranger, ce sont plutôt des guerres de quartier avec la culture associée socio-ethnico-religieuse qui ont forgé l’imagerie du foot. Avec au choix :

- les catholiques du Celtic Glasgow (les émigrés d’Irlande) face aux natifs des Rangers,
- les bourgeois du Real Madrid face aux prolos de l’Atletico,
- les catalans purs et durs du FC Barcelona face aux émigrés de l’Espanyol venus des autres régions pauvres d’Espagne.

Le foot représente donc là-bas la métaphore sublimée du substrat de haine et de mépris qui existe dans toute société et qui s’exprime plus violemment à l’égard du voisin différent que de l’étranger.

Au contraire, dans notre beau pays jacobin, le football est plutôt vécu comme un facteur d’unification identitaire qui vise à recréer les solidarités de voisinage face à un étranger, souvent proche, mais toujours odieux. Dans ce contexte, la rivalité entre l’OM et le PSG, 2 grands clubs lointains, fait plutôt figure d’exception que de règle mais obéit sans doute à une même logique : le refus de la logique centralisatrice. L’autre, le "parisien" en l'occurrence étant vu comme une danger pour l'identité locale footballistique. Quelques remarques sortis du verbatim des supporters nous aident à mieux cerner cette haine si haute en couleur, souvent citée en exemple de culture locale bien enracinée par le Guide du Routard :

Bastia / Ajaccio : "Plutôt descendre en L2 que perdre face à Bastia". (note, ça, c’est fait, NDLR) "Un bon supporter d’Ajaccio est un supporter mort" (et là bas, on ne plaisante qu’à peine, NDLR).

Nancy / Metz : "Et les mecs, c’est Guillaume II qui vous a appris à jouer au foot" (un historien du football Nancéen). "L'année prochaine, vous retournerez jouer sur la jolie place Stanislas, qu evous n'aurez jamais dû quitter" (Joël Muller)

Rennes / Nantes : "Y s’prétendent bretons, ces tafioles de Nantais, qu’i z’aillent raconter ça aux pédés de Ligue 2. Les bretons de L1, c’est nous maintenant, eux c’est un club des Pays de Loire, comme Auxerre" (un supporter Rennais). "Le cœur historique, culturel et footballistique de la Bretagne bat ici au bord de l’Erdre et non pas en plein pays Gallo, chez nos amis Rennais où l’on parle un mélange de suédois et de langue romane" (Coco Suaudeau).

Lyon / St Etienne : "Les Stéphanois m'ont fatigués pendant 20 ans. Tout leur réussissait. C'est ce qui m'a fatigué. Je suis Lyonnais. C'est la base ça. Je le suis dans l'âme, dans le coeur, donc anti-stéphanois. Je n'ai qu'une envie, c'est qu'on parle de l'OL et que St Etienne devienne la banlieue de Lyon." (Raymond Domenech). "Mes début à Lyon n'ont pas été faciles. Je cumulais les handicaps: j'étais Stéphanois, je venais de D2, et je succédais à Olmeta... c'est beaucoup pour un seul homme. Les supporters, à mon arrivé, ont tagué le siège de l'OL: "Olmeta président, Breton titulaire, pas de chien vert à l'OL". Quant à l'entrainement, un joueur me marquait un but, j'entendais les supporters qui me criaient: "ça tu vois, c'est un but lyonnais!". Une fois quelque supporters m'ont même lancé des boules de neige!" (Grégory Coupet).
Plus étonnant, la rivalité entre Strasbourg et Mulhouse, réincarnée en rivalité Strasbourg – Sochaux, par les Alsaciens du Sundgau (la région de Mulhouse, donc) par défaut. Avec des banderoles « allez Mulhouse », affichée face à Strasbourg à Bonal !

Bref, ne nous leurrons pas, la haine de voisinage a encore de beaux restes dans notre pays et c’est le carburant d’un grand nombre des supporters toujours plus nombreux, loués par le Ligue.
Aristotelicien

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