Téléfoot se délectait ce dimanche matin : la rafale de 0-0 offrait à Thierry Gilardi la possibilité de comparer goulûment le spectacle qu’offre le football anglais et européen avec la médiocrité de la Ligue 1. Sous-entendu évidemment : restez connecté sur TF1 et oubliez cette petite compétition médiocre que nous diffusons assidument depuis 27 ans et qui passera sur le Service Public l’année prochaine. A sa décharge, la première chaîne n’était pas seule à hurler. Tout ce que le France compte d’écrivains du foot s’est déchaîné dans un bel élan unanime, affligé et vengeur.
Même si l’élite du championnat de France offre davantage de buts que les saisons précédentes (moyenne de 2,21 buts par match 2006/2007 contre une moyenne qui frisotait les 2 les saisons passées), il est vrai que la 32ème journée a offert quelques raisons de désespérer. Des 0-0 comme s’il en pleuvait, des équipes paralysées par les enjeux. Et finalement, 8 but marqués dans les 10 matches. Des déceptions à la pelle. En vrac :
- Bordeaux. Incapable de dépasser leur tactique appliquée en finale de la Coupe de la Ligue : défendre et attendre. Malheureusement pour eux, Landreau n’est pas Vercoutre. Le PSG s’en sort avec 1 point.
- Conformément à ce que l’on pensait, l’OM, à 11 contre 11, n’a pas été capable de hausser son niveau de jeu et de battre une équipe de Valenciennes pourtant peu inspirée. 0-0 malgré l’armada Ribery-Cissé-Nasri-Niang-Pagis face au seul Savidan.
- Malgré un dernier quart d’heure enlevé, Lens, qui a débarqué la plupart de ses attaquants pendant le dernier mercato, ne parvient toujours pas à gagner à Nantes où le courage ne pourra plus servir longtemps de paravent au jeu.
- Troyes – Nancy : paralysées par l’enjeu, les 2 équipes se sont livrées à un pauvre spectacle. Mais Nancy prend un point à l’extérieur, ce qui prend des allures d’exploit incroyable à l’heure actuelle.
Seules 5 équipes on réussi à marquer pendant cette journée. Pas brillant.
En fait, les tares et les mérites de la Ligue 1 sont apparus dans toute leur horreur ce week end :
- pas de grands matches sans grands attaquants. Or, ceux-ci sont les joueurs dont la valeur marchande est, relativement, la plus élevée et qui prennent donc la poudre d’escampette le plus facilement vers les clubs Européens plus riches. Le phénomène s’est amplifié ces dernières années avec des départs dès la sortie de la pouponnière.
- une formation au top pour les demis défensifs et les gardiens. Cette année, les jeunes gardiens français sont particulièrement à l’honneur, Pouplin, Lloris, Pelé, des goals de moins de 25 ans. A ma connaissance, aucun autre championnat d’Europe ne peut se targuer d’une telle génération nourrie au grain sur son sol natal mais le prix à payer est le suivant : de belles manchettes et des scores étriqués. Et peu de but casquette (à l’exception de Grégorini) quand ils sont légion en Premier League.
- une tactique qui continue à privilégier la défense. Dernier exemple en date, Bordeaux. Une équipe, qui prétend à la ligue des champions, rencontre à domicile le 16ème du championnat et joue avec un seul attaquant, alors qu’une défaite ne comporte guère de risque : le club est de toute façon en UEFA grâce à sa prestigieuse victoire en Coupe de la Ligue. J’ai évidemment une explication pour cette distorsion tactique : les clubs français possèdent des entraîneurs qui sont massivement des ex-pros à profil défensif : 1 gardien, 12 défenseurs (Gillot, Der Zakarian, Furlan, …), 4 milieux (Le Guen, Hasek). Pour seulement 2 attaquants : Albert Emon et Pablo Corréa. La raison de cette distorsion dans le recrutement me semble simple : les défenseurs présentent une image de rigueur tactique et de sérieux qui rassure au moment de nommer un successeur dans une période forcément difficile. Avec lui, au moins, on ne perdra plus. Et les nouveaux entraîneurs font ce que l’on attend d’eux : ils massent aux abords de leur propre surface, travaillent le physique, glorifient le "collectif" (c'est-à-dire le repli défensif) et appellent à l’abnégation (pour les rares joueurs de devant, cela signifie harceler les défenseurs adverses et courir après les ballons balancés pendant 90 minutes, histoire de marquer un but de temps à autre). A quand l’instauration d’une discrimination positive au bénéfice des ex-attaquants ?
- la quasi-héroïsation d’Aimé Jacquet en 1998 (il jouait avec 3 milieux défensifs) a fait le reste.
Le résultat est à la hauteur de ce que l’on était en droit d’attendre. La France défend (plutôt bien) mais marque peu, surtout sur action construite. Tout le monde n’a pas Zidane dans son effectif.
Enfin, dernière explication : le hasard. Il est possible, qu’à l’instar de la 4ème journée très prolifique (35 buts), cette 32ème journée soit également « aberrante » avec une surpondération des matches stériles. On fera les comptes à la fin. Mais peu de hurleurs du jour feront réellement cette analyse. C’est moins accrocheur que de s’affliger en Arial 24 gras.
Aristotelicien
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire