jeudi 22 mars 2007

La meilleure attaque, c’est la défense (2)

Résumons nous donc : le football d’antan porté vers l’attaque et dénué de considérations tactiques donnait libre cours au jeu et aux artistes. Le temps qui passe s’est traduit par un appauvrissement du spectacle et du nombre de buts marqués et possède au moins 3 causes :
- les immenses progrès techniques et tactiques des défenseurs et du gardien. Finie l’époque où l’on mettait les buses derrière et dans les cages. Aujourd’hui les défenseurs sont à la fois physique, vicieux (afin d’éviter les cartons) et ont travaillé un sens du placement qui met souvent les attaquants en défaut (mise hors-jeu, isolement d’un attaquant sur le côté, interception des trajectoires, fautes à 50m du but pour bloquer les surnombres).
- la notion de bloc équipe : aujourd’hui, une équipe défend complètement, depuis les attaquants qui harcèlent la relance, jusqu’au gardien qui monte assez haut afin d’intercepter les longs ballons par-dessus. Les milieux défensifs, nouveaux héros de ce football moderne (à la Gattuso ou Deschamps), parcourent sans trêve des kilomètres, viennent prêter main forte aux défenseurs, interceptent, bloquent, relancent. L’espace a disparu sauf, donc, lors d’interceptions promptement jouées.
- la peur de perdre par opposition à celle de ne pas gagner. Sanction immédiate, valse des entraîneurs : les équipes, à moins d’être menées à 20 minutes de la fin ne vont pas risquer le tout pour le tout face à des forteresses difficiles à prendre.

L’International Football Association Board (IFAB), qui administre les « lois du jeu » n'est pas restée les bras croisées :
- elle a d’abord eu pour objectif de protéger les attaquants en accroissant la sévérité des sanctions : apparition des cartons (1970 !), puis durcissement des règles concernant les expulsions, parfois directes, pour brutalité.
- elle a depuis peu cherché à valoriser davantage la victoire : 3 points contre 1 au match nul, victoire directe qui prévaut en phase de poule sur le goal-average, etc.
- enfin, elle cherche à rendre les dispositifs tactiques défensifs, notamment le hors-jeu, plus complexe (rappel insistant de la règle d’avantage pour l’attaquant en cas de doute, fin du hors-jeu passif, règle de la même ligne, etc).

Tout cela n’a eu que peu d’influence sur la beauté du jeu même si ces règles ont eu le mérite de sauver quelques tibias. Cependant, les défenseurs se sont simplement adaptés : fautes plus bénignes –et plus lointaines- qui bloquent le jeu sans risque.

A noter que cette fameuse IFAB, le gardien du temple des règles du football, est connu pour son conservatisme. Composée d’1 membre de chaque fédération britannique et de 4 membres de la FIFA (depuis 1958), cette instance est particulièrement peu représentative et vise surtout à protéger la simplicité des règles. Elle se montre particulièrement réticente à adapter des dispositions qui ont fait leur preuve dans d’autres sports, comme la vidéo. Par rapport à son cousin rugby, dont l’objet est de sauvegarder l’esprit de ce sport (faire vivre le ballon tout en protégeant les joueurs), il s’attache à défendre les sacro-saintes 17 règles à la façon d’un Ayatollah condamnant une version alternative du coran. Et cela même quand l’une d’entre elles est détournée de son objet initial.

Comme on ne peut pas désapprendre à jouer aux défenseurs ou interdire la préparation physique aux milieux récupérateurs, je propose donc d’appliquer les quelques règles suivantes, qui, je l’espère, pourront améliorer l’esprit et la réussite offensive des équipes qui attaquent :
- mener comme au basket une politique de recensement des fautes : 5 fautes pour un joueur, carton jaune, 10 fautes, (c’est exceptionnel quand même), carton rouge. Bien sûr, ces cartons se cumulent aux autres pris normalement dans le jeu. Chaque équipe dispose également d’un quota de fautes (25, 30) au-delà duquel chaque faute commise est l’objet d’un carton pour le joueur fautif. Cela ferait une page de plus dans l'Equipe du Dimanche (en hausse, en baisse).
- recours de la vidéo, évidemment, pour détecter les ballons qui franchissent la ligne de but (en attendant les ballons traceurs technos actuellement en test)
- retour à la source du hors-jeu : éviter qu’un attaquant se plante devant les buts adverses. Un joueur est hors-jeu dès lors qu’il est nettement devant le dernier défenseur. Toute volonté de « jouer le hors-jeu » en avançant au moment de la passe remet automatiquement en jeu TOUS les attaquants adverses.
- suppression de la règle du hors-jeu sur coup franc.
- importation de la règle de l’avantage rugbystique. L’arbitre laisse jouer tant que l’avantage profite à l’équipe qui attaque. Si celle-ci perd la ballon, retour à l’origine de la faute.

Bien entendu, tout cela ne transformera pas d’un coup de baguette magique les tâcherons surentraînés en ballerines des terrains mais devrait aider à revenir aux sources du foot : s’amuser en essayant de mettre le plus de cacahuètes possibles dans le but adverse.

Aristotelicien

Aucun commentaire:

Qui sommes-nous ?

Footballistico est un club d'amis dont le but est d'apporter un regard original et décalé sur le football. Une lampée de tactique, une pincée d'ironie, un peu d'économie du sport, une dose d'histoire et un glaçon de respect pour le rugby et l'Argentine, secouez et c'est parti pour un blog à la fois populaire et élitiste.

Suivez nous aussi sur Twitter (footballistico)