mardi 25 septembre 2012

Marco Verratti, portrait robot du nouveau N°6, le "Makelolo"

Dans la lutte aussi vieille que le football entre création et destruction, le N°6 jouit d'une réputation particulière.

Pour comprendre l'origine du N°6, il faut remonter aux années 50. A l'époque, les principales équipes jouent en WM. Mais les hongrois vont innover en faisant reculer leur avant-centre (Hidegkuti) derrière les 2 pointes du W (en l'occurrence Puskas et Kocsis). Le fameux N°10, qui allait dicter le tempo pendant les 4 décennies suivantes, était né.

En un sens, tout a changé derrière le N°10 mais les meilleures équipes jouaient toujours avec un "trequartistas", entre les milieux et la défense, derrière les 2 attaquants (Platini, Maradona, Zidane, Pelé). Presque tous les plus grands joueurs ont occupé ce poste. Et puis, les équipes se sont adaptées et ont cherché à annihiler le talent des meneurs de jeu. Pour ce faire, elles ont positionné un milieu devant la défense. Celui-ci n'était pas seulement chargé de surveiller sa zone mais aussi d'intercepter les passes par son placement, de tacler et de perturber le jeu du N°10. Prix à payer : son apport offensif est normalement très faible. Il demeure assez bas sur le pré. En outre, sa technique est plutôt frustre. Il est souvent le premier relanceur de son équipe mais il le fait via des passes courtes, souvent latérales qui permettent d'éviter une perte de balle immédiate. Enfin, il fait preuve d'une activité inlassable et possède un goût du duel très affirmé.

Ce rôle de destructeur, dont Makélélé fut l'archétype (et John Obi Mikel son disciple) a peu à peu poussé les joueurs les plus brillants vers les côtés (Ribéry, Ronaldo, Müller, Neymar) ou un cran devant (Messi, Rooney) reléguant les numéros 10 au rang de curiosité sud-américaine (Pastore). Ceci dit, il fallait bien organiser le jeu : ici intervient le meneur reculé. Le parfait exemple en est Pirlo : positionné plus bas, celui-ci n'a pas à craindre un pressing adverse intense. Il peut distribuer le jeu, via des ouvertures longues, il est libre de monter s'il le juge utile. Rançon du succès : c'est un joueur qui est naturellement peu porté sur la défensive et donc moins apte à perturber les attaques adverses. Ses montées peuvent constituer un danger en découvrant son camp. Il doit souvent être protégé de près par un autre milieu défensif pour le couvrir en cas de rush adverse (Gattuso au Milan AC, De Rossi chez les Azzurri).

Mais quid si un "hybride" apparaît ? Un mélange d'agressivité et de créativité ? Celui-ci existe, il s'appelle Marco Verratti et préfigure les nouveaux N°6, capables de verticalité ET teigneux, décisifs MAIS prudents.

Voyons cela en statistiques :

  1. Le N°6 destructeur. John Obi Mikel possède des statistiques simples : il effectue le plus de passes de son équipe avec un taux de succès très important. Il procède donc en passes courtes (2,2 par match) , prend peu de risques, ne tire quasiment pas, ne marque dons pas et ne réalise aucune passe décisive. Il tacle raisonnablement mais surtout intercepte beaucoup (2,2 par match).
  2. Le N°6 meneur reculé. Pirlo écrase les autres joueurs de la Juve en nombre de passes par match (81 contre 67 pour le second, le défenseur Chiellini) mais est loin d'être le plus précis. En cause, un plus grand nombre de passes longues (9 par match) et une présence plus importante dans le camp adverse. Il tire plus, marque et fait des passes décisives. Défensivement, Pirlo tacle mais mal et intercepte peu (1 ballon par match).
  3. Enfin le "Makélolo", Marco Verratti, donc. Celui-ci possède des statistiques, eh bien, intermédiaires. Il n'est pas devant en nombre de passes (signe qu'il n'est pas un passage obligé dès que son équipe récupère la balle) et en taux de succès. Il effectue 5 passes longues et réalise presque 2 interceptions par match tout en réussissant ses tacles. Il ne tire jamais mais grâce à sa précision sur passes longues a déjà réussi 2 passes décisives. Il met ses partenaires du milieu à l'aise offensivement (Matuidi, Chantôme) et rend ainsi redondant un profil de milieu défensif à ses côtés (Thiago Motta). 
Marco Verratti préfigure-t-il le futur N°6 ou restera-t-il un cas isolé ? Notre anticipation est que son profil va être recherché par tous les entraîneurs de la planète. Voici pourquoi :
  1.  Il est parfaitement adapté en milieu reculé dans les dispositifs 4-4-2 losange, 4-3-3 (le dispositif à la mode) ou 3-5-2.  Il sécurise ses coéquipiers défensivement mais offre aussi une solution dès que l'équipe récupère le ballon et peut se montrer décisif en contre. En revanche, il est vrai que dans les milieux à 2 (4-2-3-1, 4-4-2 à plat), sa polyvalence peut être un obstacle, sachant qu'un entraîneur préférera 2 joueurs au profil plus marqué : typiquement un couple destructeur / relayeur (Mikel / Lampard).
  2. La proximité des lignes le rend décisif lorsqu'il parvient à marier récupération puis passe longue dans un même mouvement, ce qu'aucun autre profil ne parvient à réaliser, surtout si ses partenaires parviennent à "gicler" suffisamment vite.
  3. Enfin, sa polyvalence le rend précieux pour gérer des temps de jeu où la tactique initiale est modifiée (afin de gérer le score par exemple) ou si l'équipe doit faire l'objet d'un réajustement tactique.
On doit donc s'attendre à voir se multiplier les clones du petit italien du PSG dans les années à venir.

Footballistico

mercredi 19 septembre 2012

Real - City : les anglais loupent le hold-up

Le champion d'Espagne face au Champion d'Angleterre, il était difficile de rêver plus belle affiche pour inaugurer cette phase de poules. Si Man City se présentait dans une configuration classique (seule la titularisation du jeune Nastasic à la place de Lescott était surprenante), Mourinho avait procédé à plusieurs changements qui laissent à penser que la crise entre le portugais et son vestiaire n'était peut-être pas un vain mot. Ni Sergio Ramos (au profit de Varane), ni Ozil (pour Khedira) n'étaient sur le terrain.

Tactiquement bien sûr, c'est la titularisation de Khedira, qui était la plus intéressante. L'allemand fut libre de se porter devant, souvent positionné centralement dans le 4-3-3 de Mourinho. Ce choix possédait plusieurs conséquences :
  • il renforçait l'impact de Madrid dès que le ballon était perdu, allié à un gros travail de pressing de l'ensemble de l'équipe,
  • il offrait une solution d'un milieu en pénétration dans la surface adverse,
  • en contrepartie, l'animation du jeu madrilène manquait de créativité et de mouvement latéral.
Un effet collatéral du choix de Mourinho fut de faire reposer le jeu madrilène sur les épaules de Di Maria. Celui-ci était entraîné à l'intérieur plus qu'il n'a l'habitude. Il s'en tira plus qu'honorablement en première mi-temps (quelques tirs dangereux et un amour de petit ballon vers Higuain) mais il est remarquable de voir qu'il devint décisif en seconde mi-temps quand le fardeau créatif lui fut retiré (passeur décisif sur le but de Benzema).

1ère mi-temps :

Madrid allait commencer fort et un problème immédiat allait se poser aux Citizens : la lenteur du coté droit de la défense, avec Maicon et Kompany. Le brésilien fut souvent dépassé par Ronaldo qui redoublait avec Marcelo et le central belge fut ainsi continuellement attiré pour colmater les brèches. Kompany allait payer cette dépense d'énergie en fin de match.

Offensivement, City ne proposait pas grand chose : Nasri et Silva, nominalement ailiers eurent tendance à jouer très centralement et à s'enferrer dans la défense madrilène. Clichy montait très peu car il se retrouvait souvent seul face aux montées d'Arbeloa ou de Di Maria. Seul Maicon aurait pu constituer un danger, souvent seul à droite mais il fut rarement servi. Toutefois, après 2 parades déterminantes, le jeu de Madrid devint un peu trop prévisible (les tirs de Di Maria en se recentrant, les débordements de Ronaldo) et le match s'étirait avec assez peu d'occasions franches, Madrid s'en remettant trop aux tirs lointains. Le seul danger pour le Real était les raids de Yaya Touré. Une fois le premier rideau défensif madrilène percé, l'ivoirien avait le champ libre sur 30 mètres pour s'avancer. La passe réalisée pour Silva (qui vit son tir contré) fut la seule tentative des Citizens en première mi-temps (contre 15 aux merengues !).

L'autre événement pour l'équipe de Mancini fut la sortie de Nasri sur blessure et son remplacement par Kolarov. Celui-ci occupait le poste de Silva, à gauche, qui passait nominalement à la place du français. Comme dans les faits, l'espagnol se positionnait très centralement, la situation sur le coté droit de City ne fit qu'empirer.

2de mi-temps :

La seconde période commençait sur le même tempo que la fin de la première. Le Real avait perdu un peu d'énergie dans son pressing intense et laissait respirer son rival. City ne jouait toujours pas bien mais parvenait à conserver -un peu- le ballon. Comme souvent, les changements allaient s'avérer déterminants. Dzeko remplaçait un Silva transparent et City passait dans un 4 - 4 - 1 - 1 bancal, dans lequel, il y avait un ailier gauche (Kolarov) mais toujours personne à droite, avec Tevez derrière Dzeko.

Mourinho lançait Ozil et l'allemand se positionnait au centre du trident offensif madrilène. Le fait de supprimer Essien eu sans doute un impact sur le premier but de City. Les chevauchées de Yaya Touré sont toujours menaçantes mais le fait de supprimer un milieu défensif n'a sans doute pas aidé tout comme le positionnement de Pépé, ridiculement haut sur cette action où Varane se retrouve face à 2 attaquants.

Mourinho réagissait de façon frénétique en lançant Benzema et Modric à la place d'Higuain et Khedira.

Dans la foulée, Marcelo se jouait de Maicon et trouvait les filets de Hart, conséquence logique, mais tardive, de la faiblesse de City sur ce flanc.

Le match aurait pu se terminer sur ce score mais le coup franc de Kolarov amenait une fin de match incroyable et City craquait sur son côté droit malgré l'entrée de Zabaleta.

Conclusion : la gestion de Mancini est critiquable sur au moins 2 plans :
  • le côté droit de la défense de City était le point faible des anglais et Mancini, conscient du problème, l'a plutôt affaibli en remplaçant Nasri par Kolarov. Le coach italien pensait sans doute que Maicon pouvait surprendre Marcelo par son jeu d'attaque. Mais alors, pouquoi ne pas avoir positionné franchement un ailier de ce côté.
  • en outre, jamais les citizens n'ont paru capables de gérer le match : il restait 8 minutes à jouer après le but de Kolarov mais les anglais n'ont pas réussi à faire tourner le ballon pour épuiser les madrilènes et gagner le temps nécessaire. Une faiblesse récurrente des clubs anglais qui pourrait coûter la qualif à City. 
Footballistico


mardi 4 septembre 2012

LOSC - PSG : Ibra dépendance

Pour ce sommet de la 4ème journée de L1, les 2 dauphins de Montpellier s'affrontaient dans ce qui ressemblait pour les 2 équipes à une rédemption après une début de championnat un peu raté.

Rudi Garcia devait composer avec une équipe fatiguée par son tour préliminaire de Ligue des Champions : il avait composé une équipe assez défensive, avec le trio Mavuba, Gueye Pedretti au milieu de son 4-3-3 et Marvin Martin positionné en ailier droit à la place de Salomon Kalou. En outre, la titularisation de Nolan Roux, un attaquant d'espace donnait bien le ton du schéma de jeu lillois : assurer le combat au milieu et donner en profondeur.

Ancelotti avait décidé d'innover tactiquement : après avoir essayé 13 joueurs (!) dans son 6 de devant en 3 matches, le technicien italien tentait un 4-4-2 losange, Pastore devant servir les 2 attaquants, Menez et Ibra. On se sut pas vraiment ce que les 2 coach avaient préparé tactiquement car, en moins d'une minute, Ibra avait déjà scoré obligeant Lille à courir après le score.

1ère mi-temps : 

L'ouverture du score fut facilitée par Martin. L'ex-sochalien avait toute licence pour dériver de son aile droite. Moins au fait qu'un véritable ailier de son rôle défensif, il laissa Maxwell totalement libre sur la première offensive parisienne. De façon invraisemblable, c'est Basa (le défenseur central) qui vient contrer l'arrière gauche brésilien. Rudi Garcia avait sans doute sous-estimé Maxwell, auteur de 3 premiers matches très décevants.

Lille se retrouvait donc obligé d'attaquer. Il fut encouragé par un dispositif défensif parisien peu à l'aise en début de match. Les 2 milieux latéraux parisiens (Matudi et Motta) devaient en effet couvrir une zone beaucoup plus importante qu'en 4-3-3, où, théoriquement, les ailiers couvrent les latéraux adverses. Point d'ailier ici et le PSG souffrait, notamment sur les redoublements Martin / Béria. Ce fut particulièrement le cas de Motta, plus habitué a un rôle central. L'erreur de Jallet sur le premier corner qui occasionne le but lillois vient de là, un isolement trop grand du latéral parisien.

Paris devra régler ses problèmes défensifs sur corner mais il faut rendre hommage au corner de Payet, excellement tiré.

Le second but parisien est plutôt chanceux dans son origine (et talentueux dans sa réalisation). Ibra défendait afin de prêter main forte à ses milieux et récupère un ballon, relayé par Pastore. But.

Lille parut affecté et la dépense physique consentie face à Copenhague limitait les ambitions du LOSC. Mavuba était positionné plus près de Pastore, ce qui limitait l'apport offensif du milieu lillois. Les parisiens eurent tendance à reculer un peu, tandis que Gueye et Pedretti hésitaient à s'aventurer trop haut. Dès lors, Verratti était en surnombre et pouvait couper les ballons qui revenaient vers l'intérieur, vai Martin, notamment, pendant que Matuidi et Motta assistaient leurs latéraux. Menez joua aussi un rôle énorme en interceptant un nombre important de ballons (12) et en constituant de fait la première ligne parisienne venant perturber la relance lilloise. Paris finissait la mi-temps sans être trop inquiété, en profitant même du manque de replacement de Payet pour lancer Jallet auteur de bons centres vers Ibra.

2de mi-temps :

A la mi-temp, Rudi Garcia décida de faire entrer Kalou à la place de Pedretti. Lille passait en 4-2-3-1. En théorie, ce dispositif aurait dû créer le surnombre Lillois au milieu, les milieux parisiens étant tiraillés entre le soutien à leur latéral et la couverture des montées de Gueye et Mavuba. Mais dans les faits, les 2 milieux lillois restèrent assez prudents et montèrent assez peu.

Le PSG restait bien organisé, Verratti faisait sa teigne et Lille ne trouvait pas la solution. Le remplacement suivant était du poste pour poste (De Melo pour Roux). Dans les faits, le brésilien est très utile pour convertir des centres et des balles dans la surface, bref une situation où Lille domine. Mais la domination lilloise réelle en termes de possession fut stérile : 3 tirs en seconde période et la solution De Melo, plus statique que Roux, eut tendance à empirer les choses, en participant moins au jeu que l'ancien brestois. Dès lors, le PSG se contentait de faire enter du sang neuf, avec notamment la sortie de Pasotre pour un Néné plus actif défensivement. La fin du match fut un peu désorganisée avec un LOSC incapable de prendre le jeu à son compte et un Paris tenant bien le match, assez serein.

Conclusion : ce ne fut pas parfait mais le PSG a rendu sa meilleure copie depuis le début de saison. Il est demeuré pendant ce match assez défensif. L'équipe ne semble pas encore capable de prendre le jeu à son compte, comme un Barcelone de l'hexagone mais Ancelotti peut s'appuyer sur quelques certitudes (Ibra, Menez, Verratti, la charnière centrale) tout en continuant à chercher un dispositif brillant et une solution au problème Pastore (une passe décisive mais encore une fois décevant). Lille commence à comprendre que le départ d'Eden Hazard, un joueur capable de dynamiter une défense sur quelques dribbles ondoyants risque de coûter cher en points, Martin n'évoluant pas dans ce registre.

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